Sabot d’IvoireGabriel m'a proposé, après l'entraînement d'aujourd'hui, d'aller avec lui boire quelque chose au café, mais cette fois-ci, sans les chevaux. Lorsque j'ai lu le message sur mon téléphone cellulaire, j'ai tout de suite commencé à avoir chaud. Je croyais que nous ne faisions que du cheval, ensemble... mais ça s'avère que notre relation mérite plus que ça. Une pensée vrille alors dans mon cerveau. « C'est vrai qu'il est mignon... » J'ai manqué de me faire un
facepalm en attrapant cette pensée au vol. Je voudrais bien dire le contraire, mais... c'est vrai.
Bon, changeons de sujet!! Parlons de mes chevaux, qui sont en train de brouter au pré. Je m'apprête à emmener Sabot d'Ivoire au rond de longe avec... lui, pour améliorer ses performances en galop. Parlant de cela, aujourd'hui, il est arrivé quelque chose de spécial avec ma belle. Je suis allée à la boutique magique du domaine, parce que j'ai vu sur le tableau d'affichage qu'un nouvel objet magique était arrivé.
« Ceci est la Lymphe de Médusa. C'est quelque chose de très rare, et de très puissant. Cet élixir provient de Médusa elle-même, et elle donnera à votre cheval la beauté qu'elle a possédé jusqu'à sa mort. Tu sais, j'ai eu beaucoup de difficulté à la récupérer, c'est pourquoi je la vends à deux Perles. », m'a dit la vendeuse.
J'ai tout de suite voulu de cette lymphe. Surtout que la femme m'a dit que ça rendait les jambes des chevaux plus puissantes et souples, et donc leur performance en galop et dressage s'en voyait démesurément améliorée.
J'ai nerveusement sorti les deux Perles que je gardais précieusement, en échange de cette minuscule fiole, que j'ai versée dans l'abreuvoir de Sab', ce matin.
Surprise! Ses crins se sont allongés et ont touché le sol; son pelage est devenu brillant, et ses muscles, saillants. Ses yeux ont aussi acquis une lueur, un air mystérieux et... charmant. « Est-ce que sa première saillie sera gratuite? », je pense comiquement.
Je pense à cela alors que j'attends au bord de la rue. Comme d'habitude, Gabriel vient me chercher. Je lui parle de ce qui s'est passé ce matin. Il semble impressionné.
« Comment as-tu eu ces perles? me demande-t-il.
– C'est la dame elle-même qui me les a offertes il y a quelque temps, en échange de... services.
– Ha, je vois. Moi, je ne la connais pas vraiment, alors je n'ai pas de ces « Perles ». T'es sûre qu'elle ne donne pas de malédiction, cette potion? »
Je ris, et lui assure de la fiabilité des produits de la vendeuse. Je ramène alors la conversation à lui, et il me parle de comment Peinture a fait le fou ce matin pour galoper avec nous.
« Finalement, il nous aime bien je crois!
– Il est juste trop orgueilleux pour l'avouer. »
Je m'esclaffe encore. Sale étalon!
Je vois alors le rond de longe devant nous. Comme d'habitude, nous descendons, entrons, nous préparons et commençons. Je lui assure alors que Peint' et lui ne sont pas obligés de nous attendre, mais il me rappelle ce que ma monture a ingéré, et que ça serait plutôt à nous de l'attendre. Je blêmis.
« Désolée.
– T'as pas! T'avais juste oublié. Allez, commençons. »
Je le suis. Je me surprends alors à faire ralentir ma jument pour me caler au rythme des gars.
« Allez-y! Coureeeez! », me crie mon ami.
Je le regarde, et il me sourit. J'y vais donc au rythme de Sab'... qui est hallucinant. N'avons-nous pas déjà brisé le mur du son, à la vitesse à laquelle nous galopons? Je me le demande bien.
« Est-il possible de changer ton nom pour « Éclair d'Ivoire »? », que je dis avec humour à ma jument.
Elle ne répond pas, elle est trop concentrée à courir. Dans la vitesse, je vois une selle « sauvage » apparaître dans notre route. L'image de ma jument qui tombe sur moi me vient en tête, et je commence à paniquer. Pas question que ça recommence! Je tire alors pour la faire s'arrêter, mais tel un pégase, elle fait un puissant saut pour passer par-dessus. Elle semble peut-être effrénée dans sa course, mais en fait elle fait des plus attention! Je sens une bouffée de fierté naître dans mon ventre, alors que je vois ses pattes fouler le sol dans la plus intense vitesse et la plus grande grâce. À chaque fois que nous croisons un danger, je le lui dis et elle s'en écarte. Je suis très contente.
Gabriel et Peint' sont toujours derrière nous – sauf aux moments où nous les dépassons, après avoir fait un tour –, et eux aussi font du bon galop. Je veux aller le voir. J'impose alors à ma jument un rythme plus lent. Disons que c'est notre pause. Elle semble comprendre et va vers le duo. Elle regarde Peint', et je ne vois pas de condescendence dans son regard. Je lui demande si nous pouvons trotter, et il accepte. Sab' semble alors revenir à la normale, dans le sens que je ne dois pas la retenir comme tantôt. La lymphe n'a visiblement pas eu d'effet sur son trot. Nous sommes donc tous les quatre égaux maintenant. Cette petite « pause » trot me détend, même si en fait nous essayons d'être au meilleur de nos capacités.
Rapidement nous reprenons le galop, et Sabot d'Ivoire et moi continuons là où nous nous étions arrêtées : tenter le moins possible de toucher au sol en galopant – mais ce n'est pas du saut, hein!
Le temps passe ainsi, et même si la personne fautive a enlevé sa selle du rond, Sab' ne se laisse pas avoir par l'absence d'obstacles. Tout peut causer des accidents : des clôtures, une glissade, ... et un Paint Horse.
À la fin de la séance, donc vers seize heures, nous nous arrêtons, tous fatigués. Il nous félicite, et je le remercie, un peu gênée. C'est grâce à la lymphe...
Nous rentrons porter nos chevaux dans nos prés respectifs, puis il prend sa voiture... pour nous deux.
Comment est-ce que ça va se passer, avec lui? J'espère que je n'aurai pas l'air idiote... tiens, pourquoi est-ce que je me mets à penser à cela?
Ho mon dieu...
Et ce n'est que le début.